Ce que les Français attendent des médecines douces

C’est un sondage à prendre avec précautions mais qui fournit tout de même des réponses intéressantes à la question : qui sont les Français adeptes des médecines complémentaires ? Pour le savoir, le site Medoucine.com a interrogé 1000 personnes parmi ses clients. Sans surprise, la grande majorité des sondés sont des sondées : 85% de femmes parmi les répondants. Sans surprise non plus, les pratiques les plus demandées sont l’homéopathie (65%), l’acupuncture (55%) et l’ostéopathie (45%). Tout le reste est en dessous de 30%, jusque les plus ésotériques telles que la réflexologie (17%) ou l’ayurvéda (11%).

Plus étonnant en revanche, les consommateurs se retrouvent dans toutes les tranches d’âge de façon relativement équilibrée : 10% chez les 25-35 ans ; 17% chez les trentenaires et les sexagénaires et 25% chez les 45-55 ans et les 55-65 ans. Les médecines complémentaires ne sont donc l’apanage des jeunes ni des vieux, elles sont plébiscitées par tous les Français.

Mais pour quels motifs ? Ce n’est pas faire injure à ces adeptes que de constater qu’il s’agit de demandes diffuses, voire floues. Première raison : « soulager des douleurs » (55%) devant « gérer son stress » (54%). Viennent ensuite « la recherche d’un meilleur équilibre émotionnel » (45%) , « la prévention » (41%) et enfin « mieux dormir » (32%).

Je ne sais s’il faut s’en réjouir ou le déplorer mais de fait, la médecine dit traditionnelle ne répond pas, ou mal ou de façon insuffisante à ces attentes. Pour une part, parce qu’elle n’a pas les outils adaptés – l’équilibre émotionnel par exemple. Pour une autre part, parce que les solutions médicamenteuses s’avèrent souvent non satisfaisantes (douleur et sommeil notamment). Mais cela ne saurait justifier une autre réalité, à savoir que les médecins s’intéressent peu, voire pas du tout aux questions de prévention. Et là, les praticiens ne peuvent qu’à s’en prendre qu’à eux-mêmes si les thérapeutiques complémentaires rencontrent un tel succès : au fond, elles viennent pallier un manque criant – manque de temps, manque d’écoute, manque d’intérêt parfois.

Un dernier point sur les interactions entre la médecine classique et ce que j’appelle la pata-médecine. Je ne m’étonne pas que 60% de ces usagers se déclarent non satisfaits de la médecine traditionnelle – j’aurais même parié qu’ils seraient plus nombreux encore. Mais je m’interroge sur le fait que, pour 47% d’entre eux, « les médecines douces sont complémentaires et ne remplacent pas » les prises en charge classiques. Comment faut-il comprendre cette réponse ? Doit-on en déduire que pour 53% des sondés elles pourraient remplacer, fût-ce de temps en temps, des thérapeutiques validées scientifiquement ?

Plus inquiétant encore, selon ce sondage un tiers de ces Français viendrait dans l’espoir de « guérir une maladie ». Or, aucune de ces pratiques ne peut se prévaloir d’une telle attente. C’est d’ailleurs l’un des reproches adressés à certains de ces professionnels : laisser croire qu’un granule d’homéopathie ferait office de « vaccin » (sic) contre la grippe, qu’une manipulation de chiropracteur guérirait une hernie discale, qu’une séance de réflexologie soulagerait une céphalée chronique. Bref, imposer des retards au diagnostic ou à la prise en charge parfois préjudiciables, comme l’a souligné l’Académie de médecine dans un avis récent. Et je ne parle même pas des « vrais » charlatans, ceux qui prétendent que le sida est déclenché par les antirétroviraux, que les vaccins tuent ou que le cancer peut être soigné par le mental parce qu’il est en nous.

S’ils souhaitent gagner en crédibilité, il serait temps que les ordres professionnels concernés (quand ils existent) dénoncent avec force de tels dérapages. Et qu’ils acceptent le principe contradiction sans hurler à l’injustice. A commencer par le syndicat des homéopathes qui, pour justifier le remboursement, préfère invoquer des témoignages de patients et attaquer des confrères en justice plutôt que de fournir des preuves scientifiques. Au risque d’ajouter encore au discrédit de toute la médecine. Vous avez dit responsables ?