Aurélien Rousseau, portRait d’un type bien
… un homme de conviction et d’honneur : voilà ce que j’ajoute aujourd’hui au post ci-dessous que j’avais rédigé le jour de sa nomination au ministère de la Santé – post qui, pour mon bonheur, avait été lu par 100 000 personnes sur Linkedin !
Aurélien Rousseau a en effet annoncé ce matin sa démission du gouvernement, après le vote au Parlement d’une loi qui va l’encontre de ses valeurs, et des miennes également. Une loi honteuse qui, pour ne rester que dans le champ de la santé publique, va provoquer une catastrophe sanitaire si elle est promulguée en l’état. Merci donc à Aurélien Rousseau de porter haut le sens des responsabilités.
Un type bien. Un homme de responsabilités comme on en rencontre rarement, à la fois exemplaire et modeste. Voilà les réflexions que je m’étais faites en sortant d’un déjeuner organisé en mai 2019 par RComSanté, l’association des communicants dans ce secteur dont je suis membre.
Ouvert au dialogue, didactique, enthousiaste, il avait accepté de répondre à toutes nos questions – y compris celle sur le burn out qu’il avait connu à la sortie de l’épidémie de Covid, lui qui avait eu la lourde responsabilité de diriger entre 2018 et 2021 la plus grande Agence régionale de santé, (ARS) celle d’Ile-de-France.
Car pendant ces deux années de crise continue, Aurélien Rousseau a dû gérer l’impossible : la pénurie de masques, les services de réanimation surchargés, les décès par centaines. Le récit qu’il nous avait donné de la crise du Covid « vue de l’intérieur » était aussi saisissant qu’impressionnant. C’est lui et lui seul, par exemple, qui a décidé qu’en région parisienne la Seine-Saint-Denis serait prioritaire pour l’accès aux vaccins. Ou que les quartiers populaires auraient un accès massif aux tests de dépistage.
Durant cette période, Aurélien Rousseau avait également réussi le tour de force de faire travailler tout le monde ensemble et dans la même direction : hôpitaux publics et cliniques privées, médecins et non médecins, professionnels du soin et administratifs. Sur le pont 24 heures sur 24, il était même parvenu faire en sorte que se coordonnent l’AP-HP, véritable État dans l’État, et le ministère de la Santé. Un authentique exploit, quand on connait les susceptibilités de ce petit monde ! Jusqu’à en sortir « lessivé » selon ses termes, et connaitre une période de dépression qu’il raconte dans un livre passionnant, « La blessure et le rebond ».
Au-delà de ces exemples tirés de la crise du Covid, Aurélien Rousseau est sans aucun doute le meilleur choix possible à ce poste convoité mais à risques de ministre de la Santé. Et ce, pour plusieurs raisons.
Il connait le monde de la santé. En mai 2018, quelques semaines avant de prendre la tête de l’ARS d’Ile-de-France, Aurélien Rousseau avait rendu à Agnès Buzyn un rapport sur les métiers de l’hôpital. Une synthèse remarquable où il était question de « simplifier les statuts », de « développer la compétence et l’autonomie » des soignants, de « coopération entre les métiers », d’« équité dans les charges de travail ». Des mots rien que des mots ? J’invite tous les grincheux à lire ce document de 26 pages, ils constateront que notre homme a tout compris des maux de l’hôpital.
Il maitrise les rouages de l’administration. François Braun en a fait la douloureuse expérience : qui n’a pas la main sur l’administration n’a aucune chance de faire bouger les choses. Aurélien Rousseau, lui, est un expert en la matière. Son parcours en témoigne : onze ans à la mairie de Paris, deux ans au cabinet du Premier ministre (Valls et Cazeneuve), trois ans à l’ARS et, cerise sur le gâteau, treize mois comme directeur de cabinet d’Elisabeth Borne, ça vous donne une vision « assez » large sur le sujet !
Il comprend les territoires. Dans une première vie, Aurélien Rousseau a été professeur d’histoire-géographie en Seine-Saint-Denis. Ce département a bénéficié, on l’a dit, d’une attention particulière pendant la crise du Covid. Né à Alès, il est aussi conseiller municipal d’une petite commune de 5 000 habitants dans le Gard, une région à laquelle il reste très attaché.
C’est un homme de convictions. Adhérent au Parti communiste durant ses jeunes années, il ne cache pas son engagement à gauche de l’échiquier politique. Ni son attachement au dialogue social ce qui lui a valu cet hommage de Laurent Bergé dans Le Monde : « Il est loyal à ses chefs mais il accepte la contradiction. Il n’est pas dans le dogme. »
Il n’est pas médecin ! Je l’évoquais dans mon dernier post de blog, de nombreux médecins ont été nommés ministres de la santé. Sans doute dans l’espoir de s’attacher leurs bonnes grâces … la réalité est cruelle : aucun d’entre eux n’est jamais parvenu à leur imposer la moindre contrainte (sinon financière) mais ils ont tous finis impopulaires aux yeux des médecins.
Je prétends, moi, qu’il est préférable d’avoir un ministre sans conflit de loyauté avec sa communauté professionnelle. Quitte à se voir accusé d’illégitimité. Ce qui n’a pas tardé : dès l’annonce de sa nomination, sur le site Egora.fr par exemple, Aurélien Rousseau a eu droit à une avalanche de critiques : « la bureaucratie qui n’a jamais passé une journée avec un généraliste ». Ou encore : « On prend des inconnus, et on les remplace par des anonymes ». Jusqu’au poste occupé par sa femme, Marguerite Cazeneuve, directrice déléguée à l’Assurance Maladie, avec cette allusion « aux conversations sur l’oreiller ». On ne fait pas plus délicat.
Pierre Simon
L’article est flatteur pour le nouveau ministre de la sante. Votre jugement sur les ministres de la santé « médecin » m’interpelle. Nous avons eu sous la 5eme république, d’excellents médecins ministre de la santé
VINCENT OLIVIER
Bonjour,
Enfin, ils ne sont pas si nombreux que ça … et surtout, leur statut de professionnel les a souvent dissuadés de prendre à bras le corps la question de la permanence des soins ou celle de la formation continue par exemple.
Cordialement
VO
Jean, Marc Foult
Bonjour, j’apprécie vos commentaires… Je suis medecin, j’ai commis quelques articles dans le journal les Échos, ainsi que dans le mensuel Vsd ces dernières années. J’aimerais pouvoir devenir un correspondant régulier d’un journal sur les sujets de santé.–Medecine.
Auriez-vous un conseil ?
Très cordialement,
Jean Marc Foult
VINCENT OLIVIER
Bonjour,
Les places sont chères ! Je n’ai pas vraiment de conseil sinon de chercher plutôt des journaux à faible tirages (les « grands » ont déjà tous leurs journalistes Santé) et de les contacter avec déjà quelques propositions précises à leur faire.
En vous souhaitant bonne chance …
VO