Autotests : le grand bazar

Bonne nouvelle : des autotests du Covid à effectuer à son domicile sont disponibles depuis hier. Mauvaise nouvelle : cette info induit beaucoup de questions et bien peu de réponses.

Je résume pour ceux qui n’auraient pas suivi.

« C’est un outil de dépistage, pas de diagnostic » (dixit le ministère de la Santé)

Ils sont fiables, mais en cas de résultat positif ils nécessitent une confirmation par test PRC.

Ils seront utilisés à l’école et au collège, mais pas pour les moins de 15 ans.

6000 pharmacies ont été livrées, mais cela ne représente qu’une officine sur quatre en France.

Ils sont gratuits pour les 600 000 aides à domicile (plus exactement, remboursables) mais payants pour les autres personnes.

Les tests ont obtenu une autorisation en urgence délivrée par l’ANSM (Agence nationale de sécurité du médicament) mais pas encore de marquage CE.

Vous n’y comprenez rien ? Rassurez-vous, vous n’êtes pas les seuls. Explications.

Pour la modique somme de 6 euros pièces TTC (et là, je ne fais pas d’ironie), vous pouvez donc acheter un « kit » comprenant un écouvillon, un réactif et un capteur. Ensuite ? Eh bien ensuite, vous mettez le premier dans le nez en l’enfonçant sur 3 à 4 centimètres. Vous faites 5 rotations à l’intérieur. Vous ressortez l’écouvillon, vous mettez dessus quelques gouttes de réactif puis vous appliquez le tout sur un capteur. Une demi-heure plus tard, le résultat tombe.

S’il est positif, mieux vaut faire un test PRC pour confirmation (confirmation qui sera effective, en principe, dans plus de 80% des cas) – ce qui explique, au passage, la différence entre dépistage et diagnostic. Et s’il est négatif ? Les syndicats de biologistes affirment que chez les personnes asymptomatives, le résultat ne sera exact que dans un cas sur deux seulement. Pour être honnête, je ne sais pas d’où vient cette estimation ni jusqu’à quel point elle s’explique par le dépit de voir ce marché échapper aux biologistes mais elle est en tout cas problématique ….

Deuxième élément important : l’école. En principe, dès la rentrée des classes le 26 avril, les autotests seront à disposition de tous les enseignants du primaire avant de les proposer, la semaine suivante,  aux professeurs des collèges et des lycées. Combien de tests ? A quel rythme ? Sous quelle forme ? A ce jour, les informations sont floues, c’est le moins que l’on puisse dire. Tout au plus sait-on que Santé Publique France en a d’ores et déjà commandé 5 millions d’unités et que, d’ici la fin du mois d’avril, « 16 millions d’unités auront été commandées par l’Éducation Nationale » assure le ministère de la Santé.

Troisième interrogation : qu’en sera-t-il des élèves ? La Haute Autorité de Santé recommande en effet d’en réserver l’usage au 15 ans et plus – sans doute pour limiter les risques de mauvaise manipulation. Reste que cela pose problème, dans la mesure où la notion même de dépistage de masse perd tout son sens si les seuls bénéficiaires restent les enseignants.

Enfin, et ce n’est pas anodin, dès lors que l’usage des autotests ne signifie pas nécessairement une confirmation par PCR, quel est leur réel intérêt en milieu scolaire, voire dans la population générale tout court ? On voit bien, là, les limites inhérentes au dispositif. Si le PRC n’est pas obligatoire, il n’y a pas de traçabilité – et, partant, peu de bénéfices en termes de santé publique. Mais s’il l’est, le risque est grand que certains ne s’y soumettent pas, ou qu’ils contournent la contrainte. Bref, dans un cas comme dans l’autre on ne peut compter que sur la bonne volonté et la responsabilité de chacun. Autant dire que ce n’est pas gagné …