covid 19 : c’est la faute à Neandertal !


Et si la cause de notre fragilité au Covid 10 remontait à … 50 000 ans ? C’est en tout cas l’hypothèse très sérieuse d’une équipe de chercheurs allemands dont les résultats viennent d’être publiés dans la revue internationale Nature. J’ai repéré cette info dans un article d‘Hervé Morin sorti hier sur lemonde.fr, et je dois dire que la théorie en question est particulièrement séduisante.
Explications : dès le mois de juin, des scientifiques avaient constaté, sans pouvoir l’expliquer, des mutations génétiques bien spécifiques, en particulier sur le chromosome 3 chez certains malades atteints de formes graves de détresse respiratoire de la maladie. Pourquoi ? Comment ? La réponse est venue d’une équipe allemande de l’Institut Max Planck, spécialisée dans l’étude du patrimoine génétique de nos lointains cousins, les néandertaliens.
Celle-ci a en effet remarqué qu’aucun patient africain ne possédait les mutations en question. Sachant que Neandertal n’a jamais habité en Afrique et qu’il s’est croisé avec Homo Sapiens uniquement en Europe, l’équipe allemande a eu une intuition géniale : et si la mutation génétique identifiée sur le chromosome 3 était justement un héritage de Neandertal ? Voilà qui expliquerait l’absence quasi totale de malades en Afrique.
Pour en avoir le cœur net, les chercheurs ont donc cherché ce variant génétique aggravant chez un fossile d’un Néandertalien, appelé « Vindija » qui a vécu il y a 50 000 dans l’actuelle Croatie. Ils l’ont également cherché chez deux autres Néandertaliens originaires de Sibérie, « Altaï » et « Chagyrskaya », vieux respectivement de 120 000 er 50 000 ans. Bingo ! Le variant en question est bel et bien présent chez les trois individus.
Mieux encore, les mutations identifiées se retrouvent chez 15% des patients européens atteints de Covid 19, et chez 50% des patients d’Asie du Sud – et même 63% au Bengladesh ! Au final, écrivent les auteurs de l’étude, les gènes hérités de Neandertal constituent « un facteur de risque majeur {qui} multiplie par 3 » le risque de développer une forme grave de Covid 19 – « un peu comme si vous aviez dix ans de plus que votre âge réel », commente Svante Pääbo, le principal cosignataire de l’étude.
Le paradoxe, c’est qu’en soi, l’héritage génétique de Neandertal a plutôt constitué une facteur protecteur chez Homo Sapiens. Au fil des millénaires, il a notamment protégé les hommes en boostant leur système immunitaire. Une chose est sûre en tout cas : Neandertal n’est pas cette brute prognathe, bas du front et aux traits grossiers que certains historiens ont voulu nous « vendre », comme si seule la branche Homo Sapiens était digne de considération.
Mais c’est aussi ce système immunitaire hérité de Neandertal qui, aujourd’hui, nous rend plus fragiles aux allergies. Bref, c’est une arme à double tranchant. Au point que Luis Quintana Murci, chercheur à l’Institut Pasteur, explique dans Le Monde qu’il va très vite « néandertaliser (sic !) des cellules humaines pour étudier les effets fonctionnels de ce variant ».
Ce qui est fascinant dans cette histoire, c’est de voir avec quelle rapidité la science avance face un virus dont elle ignorait tout il y a encore quelques mois. Il y a quelques semaines déjà, une autre étude publiée dans Science a montré qu’un variant génétique impliqué dans la production d’anticorps multipliait par 8 le risque de développer une forme grave de Covid. Plus récemment, une équipe française a permis de diviser par deux la mortalité dans les services de réanimation grâce aux progrès de prise en charge. Certes, la mise au point d’un vaccin est encore lointaine. Certes, la perspective d’une guérison systématique et sans séquelles est encore une utopie. N’empêche : malgré les fakes news, malgré les sorties médiatiques tonitruantes d’un Didier Raoult, malgré les déclarations délirantes d’un Christian Perronne, la médecine avance. A son rythme.