pourquoi le confinement va durer (longtemps !)

C’est un secret de Polichinelle : demain lundi, le conseil scientifique va se prononcer pour un allongement du confinement. Combien de temps celui-ci va-t-il durer ? Quatre à six semaines me semblent un minimum. Mais, selon l’évolution de la situation, il n’est pas déraisonnable de penser qu’il pourrait s’étendre sur huit, voire douze semaines. J’entends déjà certains hurler que le gouvernement ne cesse de nous mentir. Ce sont les mêmes qui prétendent savoir tout mieux que tout le monde, qui refont l’histoire à l’envers jour après jour. Les mêmes qui dénoncent aujourd’hui l’inaction des autorités et qui dénonçaient hier l’écho donné à ce qu’ils appelaient une « petite grippette ».

Oui, sans doute, le gouvernement sait depuis le début du confinement que la période de 15 jours serait prolongée. S’il ne l’a pas dit, c’est pour une raison simple : pour qu’une mesure contraignante forte soit appliquée, il faut au préalable qu’elle soit comprise et acceptée, comme je l’expliquais dans un post précédent. Annoncer immédiatement un confinement de quatre semaines, voire plus, c’était prendre le risque de provoquer un effet de panique. Celui-ci s’est d’ailleurs produit le week-end dernier, avec une ruée dans les supermarchés et un « exode » important – et déplorable – de nombreux Parisiens dans leur résidence secondaire. Mais il aurait sûrement été plus important encore si le gouvernement avait d’emblée imposé une durée plus longue.

De même (ou à l’inverse si l’on préfère), annoncer immédiatement un confinement de quatre semaines, c’était prendre un risque de réticence générale. En clair, le risque que les Français ne le respectent pas simplement parce qu’il leur aurait semblé impossible à respecter. Là aussi, le succès a été relatif mais il aurait été plus faible encore si le gouvernement avait dit « la vérité ».

Et c’est justement là où je veux en venir : non, le gouvernement n’a pas « menti », il n’a pas « caché la vérité ». Il a dit ce qui était audible et acceptable à l’instant T au plus grand nombre possible. Il a visé l’efficacité plutôt que l’hyper-transparence, et il a eu raison – puisque les Français qui se conduisent comme des enfants, ainsi que je déplorais dans ce post. Ceci posé, pourquoi disais-je plus haut que le confinement pourrait durer jusqu’à douze semaines ? Parce que, la période d’incubation étant de 15 jours minimum, il faut donc au moins 15 jours de confinement pour être sûr qu’il n’y a plus de « porteur sain » (personne atteinte sans symptôme mais contaminante). Ajoutons à cela une semaine supplémentaire par sécurité et deux autres semaines pour commencer à voir la portée réelle de ces mesures, on arrive à 6 semaines.

Ensuite ? Eh bien, le confinement sera prolongé tant que l’épidémie ne sera pas contenue a minima. C’est-à-dire tant que le nombre de patients en réanimation n’aura pas commencé à baisser, tant que les services d’urgence seront saturés. Mieux vaut être réaliste : lorsque ce moment sera arrivé, tout ne va pas repartir d’un coup. Si l’on veut que l’épidémie ne reflambe pas, il faudra en passer par une sortie très progressive du confinement. Autoriser pas à pas la reprise de certaines activités économiques. Accepter de différer le temps qu’il faudra les grands rassemblements (sport, spectacles, concerts…). Continuer à pratiquer les gestes barrière, se laver très régulièrement les mains. Et dépister toutes les personnes encore contaminées pour leur imposer une période supplémentaire de confinement. Cela n’a rien d’enthousiasmant. Cela va durer. Mais cela est nécessaire.

Dans mes activités de conseil (quand j’en avais encore !), j’avais coutume de dire à mes clients ceci : entre qui vous appartient et ce qui ne vous appartient pas, ce qui dépend de vous et ce qui ne dépend pas de vous, mettez toute votre énergie dans le premier, pas dans le second. Une formule plus « grand public » qui renvoie à la phrase de Marc Aurèle : « Donnez-moi la sérénité d’accepter les choses que je ne peux pas changer, le courage de changer celles que je peux changer, et la sagesse de distinguer les premières des secondes ».

Vous souhaitez que le confinement dure le moins longtemps possible ? Cela ne dépend ni du gouvernement ni des scientifiques. Cela dépend de vous. De vous uniquement. Restez chez vous.